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Viva la Libertà

5 juillet 2017

ADIEU MADAME VEIL

                         Depuis que, vendredi dernier, une collègue, l'oeil rivé sur son téléphone, a jeté "Oh ! Simone Veil est morte !", le souffle me manque... L'air est moins pur, la vie est plus difficile, les fardeaux sont plus lourds.

                          Je ressens le besoin puissant de vous écrire, de vous dire "au revoir". Etrangement, j'écris peu ici mais l'un de mes premiers billets sur ce blog était consacré à une colère contre des propos de membres du front national évoquant les "IVG de confort". Comment alors ne pas se souvenir de vos mots sur "l'avortement qui est toujours un drame, qui restera toujours un drame"... ?

                         J'écoute, en commençant ce billet, l'émotion de vos fils lors de cet hommage national...et leur force, leur courage, leur amour irradient.

                         Le président de la République vous rend également un hommage magnifique que j'espère vous entendez dans cet au-delà de douceur qu'évoquait votre fils tout à l'heure. Il annonce, pour conclure son discours, qu'en accord avec votre famille, il a décidé que vous et votre mari serez inhumés au Panthéon. Cette décision, rapide, demandée par des milliers de voix dès vendredi soir, est symbolique de votre parcours, de votre vie : "Aux grands Hommes, la patrie reconnaissante"... Tiens, encore un lien avec l'un de mes billets... Pour le coup, ce choix est évident et, comme M. Berthelot qui voulait que sa femme soit auprès de lui dans la mort, Antoine Veil restera auprès de vous... Magnifique symbole. J'entends déjà ceux, plutôt celles, qui veulent changer la devise républicaine, mais, pour moi, ce mot "homme" doit être pris au sens du "Mensch" allemand, "être humain". Madame Delphine Horvilleur, rabbin magnifique qui doit lire votre Kaddish tout à l'heure, explique dans sa tribune dans Le Monde d'aujourd'hui : "En yiddisch, un homme exemplaire, capable de guider et d'inspirer sa génération, est appelé un mensch. Je ne connais pas le féminin de ce terme. Mais je peux vous dire très facilement à quoi il ressemble. Pour beaucoup d'entre nous, il a dorénavant le visage d'une femme née le 13 juillet 1927, une jeune fille âgée de 16 ans quand elle pose le pied en pleine nuit sur la rampe d'Auschwitz, une femme qui survit, témoigne et fait gagner la vie, une militante, une épouse, une mère, une grand-mère, une pionnière, une Européeene, une immortelle."

                         On nous dit sur les plateaux de télévision, dans les articles et même dans les dictionnaires que vous étiez une "femme politique". Je ne vous ai jamais nommé ainsi, je ne pense pas que vous étiez une femme politique. Vous avez été ministre, bien sûr, élue députée européenne, oui, oui, première présidente de la communauté européenne, je sais. Mais, pour moi, vous êtes une femme droite, active, combattive... La liste des adjectifs serait trop longue, je l'arrête ici. Mais, vous n'étiez pas, à mon avis, une femme politique telle qu'on l'entend dans notre pays, parce que vous ne faisiez pas de compromis quand l'essentiel était en jeu, parce que vous ne disiez pas ce qu'il fallait dire ou ce que le peuple voulait entendre pour plaire ou vous faire élire, parce que vous pouviez dire que quelqu'un que vous aviez soutenu était en train de faire des choses stupides ou iniques, parce que vous pouviez dire que qu'un adversaire avait raison sur tel ou tel point, parce que vous étiez en colère, mais pas une colère haineuse, pas une colère stérile. Votre colère était celle qui s'indigne des mépris, des humiliations, des actes inhumains mais aussi celle qui agit, qui se donne les moyens de lutter efficacement. 

                      J'avais lu, à sa sortie, votre autobiographie et elle reste une lecture forte, impressionnante au sens où elle s'est imprimée en moi.

                       Il me reste cependant un mystère. Vous avez choisi, parmi les symboles gravés sur votre épée d'Académicienne, le numéro de matricule que les bourreaux nazis ont gravé sur votre avant bras. Pourquoi ce choix ? Je sais que vous avez dit à de nombreuses reprises que vous étiez sortie d'Auschwitz mais qu'Auschwitz n'était pas sorti de vous, que vous y pensiez à peu près chaque jour. Je me souviens aussi de ce jour où vous posiez une "première pierre" avec truelle et mortier et que devant la réflexion amusée d'un élu, me semble-t-il, notant votre dextérité, vous aviez répondu que c'était votre "métier au camp " ! A l'époque, vous étiez quasi inconnue du grand public et même au sein des "milieux informés", beaucoup ignoraient que vous aviez été déportée à l'âge de seize ans et demi, que vous aviez perdu une grande partie de votre famille... Ce matricule pour rappeler aux autres que vous, vous ne pouvez jamais oublier ce qu'il signifie ? Ce matricule pour lutter jusqu'au bout contre la déshumanisation tentée contre chaque Juif ainsi marqué ? Si ce matricule vous personnifie alors prenons-le comme signe de ce que vous êtes ?

                      Adieu Madame...

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9 février 2014

MONTAIGNE ET LES FRANCAIS

     Nous avons, quand je dis « nous », j’évoque les Français, la réputation d’être des touristes déplorables… et bien souvent, j’ai tenté de cacher que  j’étais française à l’étranger. Ne serait-ce qu’en faisant l’effort d’essayer de parler la langue de nos hôtes.

     Une nouvelle preuve m’a été donnée tout à l’heure que le jugement de Montaigne sur les Français en voyage était toujours, malheureusement, d’actualité. Zappant à la recherche d’un programme intéressant, j’entends, sur des images d’assiettes dans un beau restaurant, cette phrase : « Ici, pas de spécialités russes, mais des escargots, du coq au vin et une tarte tatin. Une bonne surprise pour ces Français venus spécialement pour les Jeux Olympiques.» Les Jeux Olympiques d'hiver ont effectivement en lieu en ce moment, à Sotchi, en Russie, sur les bords de la mer noire.

     Quel est l’intérêt de chercher aussi loin ce que nous savons faire chez nous, ce que nos grands-mères faisaient si parfaitement ??? Pourquoi chercher à retrouver ses repères, y compris culinaires ??? Le voyage ne doit-il pas être une occasion de découvertes, d’ouvertures aux autres, à leur culture, et donc aussi à leur cuisine ???

     Je vous laisse méditer cette anecdote et vous propose de la confronter à cet extrait des Essais de Montaigne :

« J’ai honte de voir nos compatriotes enivrés de cette sotte manie [qui les porte à] s’effaroucher des manières contraires aux leurs : il leur semble qu’ils sont hors de leur élément s’ils sont hors de leur village. Où qu’ils aillent, ils restent attachés à leurs façons [de vivre] et abominent celles des étrangers. Retrouvent-ils un Français en Hongrie ? ils fêtent cette aventure : les voilà à se rallier et se recoudre ensemble, à condamner tant de mœurs barbares qu’ils voient. Pourquoi ne seraient-elles pas barbares puisqu’elles ne sont pas françaises ? et encore ce sont les plus intelligents qui les ont remarquées, pour en médire. La plupart d’entre eux ne partent en voyage que pour faire le retour. Ils voyagent cachés et renfermés en eux-mêmes, avec une prudence taciturne et peu communicative, en se défendant contre la contagion d’un air inconnu.»

Essais, Livre III, Chap. IX – De la Vanité, « L’Art de voyager », translation d’André Lanly, Quarto ©

8 décembre 2013

LA MARRAINE D'ARTHUR

     Le 24 septembre dernier, dans la proche banlieue parisienne, ma meilleure amie a donné naissance à un garçon magnifique qu'elle a prénommé Arthur.

   Son fils aîné, Axel, a dix-sept ans, et elle rêvait, attendait, portait Arthur depuis bien longtemps en elle avant ce beau jour de septembre.

   Les hasards (existe-t-il celui-là ??? j'en parlerai plus tard... peut-être) de la vie ont fait qu'après une longue période où nous nous étions perdues de vue, mais pas de coeur, elle a retrouvé mes coordonnées le jour de mon anniversaire. Jeune maman heureuse, épanouie, elle m'envoie un message avec des photographies de son adorable trésor. Je lui réponds immédiatement, les larmes aux yeux de l'avoir retrouvée, et retrouvée avec son Arthur dans les bras. Plusieurs messages et coups de fils plus tard, je vais la voir, les voir. C'était le 30 octobre dernier.

     Ce n'est évidemment pas la première fois que je prenais un bébé dans mes bras, mais il est vrai que ça ne m'était plus arrivé depuis plusieurs années. Tous ceux qui ont porté un enfant ainsi savent les émotions qui submergent alors, la tendresse qui envahit tout l'être, l'impression d'une osmose entre ce petit être fragile et merveilleux et soi... Tout petit encore, il serre mes doigts par réflexe, fait la moue quand on cesse de lui sourire, cherche la position idéale pour téter... Un après-midi rythmé par le temps d'Arthur...

    Ces retrouvailles à des moments cruciaux de nos vies à toutes les deux résonnent de nos souvenirs et de nos projets, de nos rires et de nos pleurs, de nos choix et de nos envies. Nous ne nous quittons plus vraiment. L'amitié aussi est parfois une conversation ininterrompue...

     Elle décide alors que je suis la marraine d'Arthur. Une marraine au sens de la marraine des contes de fée qui se penchent sur le berceau des princes et princesses pour exaucer leurs voeux. Une marraine qui guide, qui apporte un peu de son univers, qui fait passer des valeurs humaines, humanistes. Une marraine pour l'aimer.

    Je ne suis pas une marraine au sens religieux ou civique. J'ai oint mon filleul avec une goutte de Champommy sur le bout du nez !!! Je suis une marraine fière et heureuse de la présence d'Arthur dans nos vies.

   Tout au long de ce week-end qui s'achève bientôt, Arthur m'a reconnu, m'a souri, a tiré sur mes cheveux, m'a serré les doigts parce qu'il voulait serrer mes doigts. Il a régurgité une partie de sa tétée et fait d'autres choses moins belles et douces. Et c'est aussi pour ça que je me sens sa marraine. Parce que je ne partage pas juste les sourires... Parce que je suis déjà une petite présence dans sa vie et qu'il est une force de bonheur dans la mienne.

20 octobre 2013

POUR UNE FOIS...

     Une fois n'est pas coutume, je vais parler de mode dans le billet d'aujourd'hui...

   Je me demande parfois pourquoi les stratégies des commerciaux fonctionnent autant !!! Pourquoi des millions de consommateurs acceptent-ils de se faire dicter leur façon d'acheter et acceptent qu'on leur crée artificiellement des besoins ???

   Je ne vais pas faire une liste ici, vous la connaissez et soit vous êtes d'accord avec moi et vous aurez envie d'en ajouter, soit vous ne le serez pas et ferez semblant de ne pas comprendre...

   Dernier exemple en date, lié à la mode donc, le fer à friser. Oui, oui, vous avez bien lu, le fer à friser. Quoi, vous ne savez pas ? Et oui, c'est fini le fer à lisser !!! Réveillez-vous, là ! Vous utilisez, depuis quelques années, des produits les plus variés pour perdre vos belles boucles, vous lissiez chaque jour votre chevelure indisciplinée ? Et bien c'est terminé !!!

      Je cite le magazine mode de L'Express, Styles : " La maxi-ondulaion seventies est partout : chez Roberto Cavalli, Marc by Marc, Diane von Fürstenberg... Pour la maîtriser, deux nouveaux fers à boucler entrent en piste. L'un crée des boucles en moins d'une minute, sans risque de se brûler, Boucleur velours, Philips, 50 euros. Le Curl secret, lui, aspire la mèche et forme la boucle sans mouvement du bras. Babyliss, 130 euros. "

     C'est pas merveilleux ?

   Mesdemoiselles, mesdames, je vous en prie, soyez plus intelligentes que ces penseurs de la consommation et trouvez votre style. Celui qui correspond à votre chevelure, à la forme de votre visage, à vos envies du moment. Lissez ou frisez, mais quand et comme vous en avez envie.

12 octobre 2013

UNE FEMME AU PANTHEON ?

     Nous entendons, depuis plusieurs semaines, répéter à l'envi : "il faut que les femmes entrent enfin au Panthéon". Je me demande simplement, pourquoi ?

     Il est vrai que seulement deux femmes y sont présentes. La première, Sophie Berthelot, parce qu'elle "accompagne" son mari, les époux avaient précisé qu'ils ne voulaient pas être séparés, même dans la mort et la seconde, pour elle-même, la scientifique, double prix Nobel de physique, Marie Curie. Depuis, plus aucune femme n'est entrée au Panthéon. Evidemment, de nombreuses femmes auraient mérité d'entrer dans ce temple de la République, de la "patrie reconnaissante", mais est-ce vraiment la question ?

 Souvenons-nous de plusieurs éléments avant de décider d'une nouvelle entrée.

- D'abord, de très nombreux hommes présents sont totalement oubliés aujourd'hui. Napoléon I a choisi de nombreux maréchaux, par exemple... Et des hommes très importants pour notre "patrie" n'y sont pas entrés. La présence au Panthéon n'a donc qu'une signification relative.

- Ensuite, faire entrer quelqu'un au Panthéon longtemps après sa mort, après son inhumation dans un lieu généralement symbolique pour lui, c'est le retirer de ce lieu, c'est l'enlever à une ville, un village qui le commémorait, qui souvent a construit une partie de son intérêt touristique et culturel autour de lui. Je vous donne un exemple, la "panthéonisation" (mon dieu, que ce terme est laid !) d'Alexandre Dumas. Cet écrivain connu bien au-delà de nos frontières est né près de chez moi, à Villers-Cotterêts. J'ai même vécu et travaillé dans cette ville, c'est dire que je connais bien l'exemple que je vous soumets. Il n'est pas mort dans sa ville natale, mais il y a été inhumé, grâce à son fils (Alexandre, l'auteur de La dame au Camélia).  La ville a dû accepter de perdre sa "gloire locale", le sud du département a été amputé d'un des fleurons de sa route des écrivains (Dumas était en compagnie de Jean Racine à La Ferté-Milon, de Jean de La Fontaine à Château-Thierry et de Paul Claudel à Villeneuve sur Fère).

Villers-Cotterêts est une petite ville. Pour les journalistes parisiens, c'est même sans doute un gros village. Elle possède un château de la Renaissance en très mauvais état (l'édit de Villers-Cotterêts signé par François I qui rend le français obligatoire dans tous les textes publics et juridiques, ça vous dit quelque chose ?). Pourtant, elle n'a rien gagné en acceptant qu'on lui prenne Alexandre Dumas...

- Enfin, l'entrée au Panthéon est une consécration, une façon d'élever une personne au rang de héros. Et cette position n'est pas nécessairement en adéquation avec les idées, les convictions des personnes jugées dignes de cette glorieuse entrée. Si Jean-Paul Sartre put refuser le prix Nobel de littérature, un mort ne peut plus rien refuser, on peut le "récupérer"...

     Voilà les raisons pour lesquelles je suis toujours très réservée quand on parle d'une nouvelle entrée au Panthéon. Et quand il s'agit d'une idée aussi simpliste que "il n'y a pas assez de femmes", je me dis que quelque chose ne fonctionne pas. Plutôt que de faire entrer ici une femme, sans aucun doute digne de l'être, travaillons à ce que les femmes d'aujourd'hui puisse faire de vrais choix de vie, quel qu'il soit, que le sexisme devienne un mauvais souvenir... Je ne suis pas féministe, trouvant souvent les revendications des associations et autres "Chiennes de garde" un peu ridicules, mais je rêve encore d'une France, puis d'un monde, plus égalitaire. Faire entrer une femme au Panthéon (ou dans un gouvernement ou un conseil d'administration...) seulement parce que c'est une femme, ça n'est pas convaincant...

 

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23 février 2013

BONHEUR DE LECTURE

       Au gré de mes nombreuses lectures, je croise souvent un genre que j'apprécie particulièrement, le roman historique. Mais, il n'est pas si facile d'écrire un bon roman historique, un roman qui raconte une histoire sans donner des leçons d'Histoire mais sans maltraiter la "vérité historique" (en admettant qu'elle existe, mais c'est un autre débat). Fondre le récit fictif et la réalité, donner à voir la vie de personnages qui côtoient des personnes, susciter plaisir de lecture et émotions pour un temps, un monde à jamais enfouis et parfois très éloignés de notre réalité quotidienne, voilà les quelques ingrédients essentiels pour écrire un roman historique agréable à lire.

      Mais avec ce livre, que je n'avais pas remarqué à sa sortie en France en 2009, il ne s'agit plus de recette ni d'ingrédients plus ou moins bien assemblés, il s'agit d'un grand roman, qui se trouve être aussi un roman historique.

     Tim Willocks, dans La religion, raconte, pour la partie historique, le siège de l'île de Malte par les troupes de Soliman le Magnifique durant le printemps et l'été 1565. Il évoque les combattants, les assauts, les stratagèmes... avec tant de force que nous sommes aux côtés de ses personnages, pris dans la folie des hommes qui placent leur Dieu (et la guerre) au-dessus de tout.

    "La religion" désigne les chevaliers de l'ordre de Malte qui se sont réfugiés dans cette île après la prise de Rhodes par ces mêmes musulmans qui viennent tenter de les déloger. Parmi ces chevaliers, le grand Maître, La Valette, est une figure grandiose à laquelle l'auteur donne toute sa place. Mais les personnages principaux de ce grand roman sont fictifs et ils sont très attachants. Le héros, Matthias Tannhauser, est magnifique : jeune forgeron maître d'armes au début du récit, il vit mille aventures aussi bien avec les Musulmans qu'avec les Chrétiens. Il a des amis et des ennemis dans les deux camps et ne semble n'avoir qu'une seule règle : ne pas se perdre lui-même.

     La musique, deux femmes et un enfant vont le conduire dans cet enfer, dans Malte assiégée.

     La Religion est un grand roman et aussi un très grand bonheur de lecture. Il fait partie de ces livres dans lesquels on veut avancer vite, pour connaître la suite. Mais en même temps, on se surprend à ralentir la lecture, pour savourer l'écriture, rester plus longtemps dans cet univers et vivre encore avec ces personnages, dont on se sentira un peu orphelin la dernière page tournée.

     Tim Willocks a remarquemablement décrit ses personnages, l'île de Malte, la guerre... Son style à la fois épique et réaliste, cru et poétique est envoûtant. Il ménage le suspens, mais jamais avec les procédés éculés déjà lus mille fois, non, le suspens naît de la situation des personnages, de leurs émotions, de leur vie intime... Et puis, il a pleinement réussi son "méchant", un inquisiteur tel qu'on aime les détester.

    Pour finir, puisqu'il faut bien finir, si vous aimez lire, tout simplement, plongez dans ce roman de 852 pages aux éditions Sonatine et vivez un très grand et beau moment de lecture.

 

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23 avril 2012

LA FRANCE VA MAL

      Oui, la France va mal.

      Pourquoi 20% des électeurs ont-ils choisi de mettre le bulletin "Marine Lepen" dans l'urne hier ?

      Les raisons sont multiples et diverses et je ne vais pas ici répéter ce que vous avez entendu et lu ces dernières heures. Non, ce que je veux écrire c'est qu'on peut en tirer au moins deux enseignements, et ils ne sont pas rassurants.

     D'abord, nous n'avons pas assez expliqué que Marine Lepen était une mauvaise candidate pour la France parce qu'elle oppose les Français "de souche" et les autres ; parce qu'elle fait croire qu'elle parle aux gens les plus pauvres alors que son programme économique jetterait la France dans un désarroi bien plus grave encore que celui dans lequel elle est déjà...

     Ensuite, nous n'avons pas parlé à ces gens qui se sentent en marge de la société. En marge parce qu'ils ne sont pas dans une ville avec tous les services publics, avec des politiques économique, sociale, parfois écologique dignes de ce nom. En marge parce qu'au chômage ou sans perspective d'avenir. En marge parce que "l'ascenseur social" est en panne depuis trop longtemps. En marge parce qu'ils ont l'impression que le "monde mediapolitique" ne parle pas d'eux, sont trop loin de leurs préoccupations quotidiennes...

     Il faudra donc travailler pour la France et pour tous les Français, sur le plan économique et social bien sûr, changer nos modes de gouvernance mais je crois qu'il faut aussi changer quelque chose dans notre éducation pour que nos jeunes apprennent la lecture des implicites, le recul critique et la réflexion. Il faut, plus encore que nous le faisons déjà, apprendre à nos jeunes à penser par eux-même. Ce n'est pas facile, certes, mais c'est une solution d'avenir...

21 avril 2012

HISTOIRE, ENIGME POLICIERE ET CUISINE

     Le week-end dernier, une amie m'a offert un roman à la fois historique et à énigme sur fond de lutte de pouvoirs entre les médecins, les apothicaires et les épiciers. Il s'agit d'une série de romans qui prend appui sur une période historique vue à travers la cuisine, pour celui dont il est question ici, le premier de la série, c'est la Renaissance. Les descriptions culinaires sont alléchantes...

    Un jeune étudiant en médecine, passionné par la cuisine, enquête sur la mort de plusieurs personnes empoisonnées par des plantes inconnues, apparemment venues des toutes nouvelles Amériques. Le style est enlevé, agréable ; l'enquête est rondement menée par des personnages attachants ; la Renaissance et la cuisine de cette époque, faite d'épices et d'herbes aromatiques, chantent à chaque page.

   Bref, c'est une jolie surprise, une belle façon de s'initier à cette époque très riche. Et en prime, un cahier de recettes pour clore ce charmant petit volume intitulé, il est quand même temps que je vous le dise, Meurtres à la pomme d'or. Le sous-titre "Roman noir et gastronomique au temps de la Renaissance" dit tout du programme de lecture offert par Michèle Barrière au Livre de Poche.

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20 mars 2012

ET VOUS PENSIEZ QUE LA VIE CONTINUAIT ...

     Quand je suis arrivée dans l'établissement dans lequel je travaille encore aujourd'hui, j'ai vécu un événement bouleversant. C'était ma première semaine d'oraux préparatoires à l'épreuve anticipée de français : toute la journée de cette semaine, je faisais passer des oraux à des élèves de première. J'étais dans mon élément, je maîtrisais complètement ces journées durant lesquelles je choisissais textes et questions. Et pendant ce temps, je croyais que la vie continuait...

     Et puis, il y eut le jeudi 11 mars 2004. Vous vous souvenez ?

    Imaginez, après une journée somme toute riche et intense, vous montez dans votre voiture, vous mettez la radio et là vous apprenez que des attentats ont tué à Madrid. Vous posiez des questions sur Baudelaire ou Voltaire et la vie s'était arrêtée dans le bruit et dans le sang au coeur de Madrid... Vous pensiez que la vie continuait sans vous, en dehors de vous, mais comme avant, et ce n'était pas le cas.

    Depuis, chaque année, quand commence cette semaine de passage des oraux, j'y pense. J'ai un pincement au coeur à l'idée que je vais me soustraire de la vie, du flux des informations... Et hier, j'ai cru vivre un cauchemar. De nouveau, la haine s'était déchaînée, de nouveau la mort avait frappé... contre une école juive !!! contre des enfants !!!

    Pour le moment, nous ne savons encore rien des mobiles de l'assassin (même si la cible nous donne doublement froid dans le dos), mais cet événement rappelle à chacun d'entre nous que la vie est fragile, que la haine peut encore frapper à tout moment, y compris dans une école, y compris de très jeunes enfants !

7 mars 2012

LE DEREMBOURSEMENT DES "IVG DE CONFORT" !!!

     Alertée par un twitt de madame le maire de Reims, Adeline Hazan, je viens d'écouter sur cette page http://leplus.nouvelobs.com/contribution/313897-ivg-de-confort-cher-louis-aliot-pretez-moi-une-aiguille-a-tricoter.html l'ahurissante interview de M. Alliot, numéro 2 du Front National. Le passage commence par une question de l'excellent Yves Calvi : "Je voudrai savoir si vous voulez vraiment dérembourser l'IVG." M. Alliot répond alors : "Oui, quand il est un IVG de confort qu'il est un substitut au..." Il est coupé d'abord par Michel Sapin (socialiste) qui lui demande ce que signifie cette expression puis par Daniel Cohn-Bendit (écologiste) qui s'insurge et qui rappelle le droit et le choix des femmes.

     Après cette intervention, M. Alliot délire complètement avec cette phrase qui étonnera (et le mot est bien faible) toutes les femmes qui n'ont pas réussi à procéder à cette difficile intervention en France, qui surprendra tous les membres des personnels de ces services qui savent comment ce choix est respecté bien sûr mais jamais considéré comme une solution unique et sans conséquence. Je vous délivre donc cette phrase : "Il y a des femmes qui voudraient garder leur enfant et tout est fait pour qu'elles le laissent cet enfant (coupure de D. Cohn-Bendit), tout est fait pour inciter à l'avortement et rien n'est fait pour préserver la vie et l'accueil de la vie."

     Si le Front National voulait rappeler qu'il n'a que faire des libertés individuelles, des progrès sociaux, du droit des femmes..., il ne pouvait faire mieux que cette sortie incroyable. Et dire que ce parti est présidé par une femme !!!

 

1 mars 2012

LITTERATURE ET BIOGRAPHIES IMAGINAIRES

     Lire un roman ou une bande dessinée, c'est entrer dans un univers, celui d'un artiste. Mais, quand l'auteur entraîne son lecteur dans une histoire fondée sur une réalité connue de lui, c'est souvent jubilatoire.

     Aujourd'hui, les biographies imaginaires sont fréquentes et je ne donnerai que deux exemples, mais quels exemples !

    Comme l'écrit Graham Moore dans une "Note de l'auteur" qui sert de postface à son roman, 221 b Baker Street, ce qui fait la richesse et le plaisir de ce type de récits c'est la capacité à réussir le "collage mêlant réel vérifiable, probablement réel, potentiellement réel et manifestement faux". Et c'est ce qu'il a fait avec maestria dans ce récit qui se compose de deux enquêtes menées alternativement (un chapitre sur deux). 

     La première se déroule à Londres en 1900-1901 et elle est conduite par Arthur Conan Doyle et Bram Stoker (l'auteur de Dracula). On y trouve la haine de l'auteur pour son personnage, Sherlock Holmes, devenu un véritable détective aux yeux de ses lecteurs !!! ; le désespoir de Stoker de ne pas avoir créé un personnage digne de ce nom, persuadé qu'il ne passerait pas à la postérité !!! ; mais aussi le nouvel immeuble de Scotland Yard et l'arrivée de l'électricité dans les maisons et dans les rues londoniennes.

     L'autre enquête est prise en charge par un jeune homme qui appartient à un club de fan de Sherlock Holmes : il cherche à savoir qui a tué un de ses collègues de club alors qu'il avait trouvé, disait-il, le journal disparu de Conan Doyle. Ce journal couvre une période au sortir de laquelle Conan Doyle avait repris le personnage honni et écrit le chef-d'oeuvre mondialement connu, Le Chien des Baskerville. Cette aventure se déroule en 2010 en Angleterre et aux Etats-unis. Vous aurez deviné que le journal traite de la première enquête du roman de Moore, mais je ne vous en direz pas plus... Reste que Moore tente de combler un manque dans la biographie de Conan Doyle et que, pour ma part, je trouve que c'est très réussi.

 

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     L'autre exemple, très récent également, est une bande dessinée intitulée La Chambre de Lautréamont écrite par Corcal et dessinée par Edith. Elle raconte l'histoire de cette chambre dans laquelle Lautréamont et Rimbaud auraient vécu des événements forts, terribles et fantastiques. Contrairement au récit évoqué précédemment, ici, tout est fait pour que le lecteur doute de ce qu'il lit : une introduction et un dossier en postface affirment la réalité de ce que nous lisons. Mais, ce qui nous est raconté est incroyable, généralement invérifiable et fondé sur le caractère très lacunaire des informations que nous avons sur la vie d'Isidore Ducasse, comte de Lautréamont. Une grande partie des personnages du récit ont existé, mais les auteurs leur prête une vie plus longue, plus riche, plus fantastique aussi. Les dessins d'Edith contribuent à cette difficulté de se faire une idée sur ce que nous lisons puisque ces personnages / personnes sont très reconnaissables... Bref, c'est une très belle bande dessinée qui plonge le lecteur dans le Paris du XIXe siècle, celui des poètes maudits...

 

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29 février 2012

DU PLAISIR DE LA DEDICACE

    

Un samedi de rêve dans le festival de BD de Coquelles (62)...

      Lors de notre avant-dernier festival de BD en novembre dernier (le très beau BD BOUM de Blois), nous avions pu voir la magnifique exposition de planches de Béatrice Tillier, la dessinatrice des premiers tomes de la trilogie scénarisée par Jean Dufaux, Le Bois des Vierges.  Nous ne connaissions pas cette BD ni même cette dessinatrice, et nous avons été séduits immédiatement par son travail.

     A Coquelles, Béatrice Tillier était présente pour une seule après-midi de dédicaces et nous avons eu la chance de tirer tous les deux un numéro au tirage au sort (les 12 et 15 ... sur 15  !!!). Nous avons donc eu une magnifique tête du prince des loups sur le fond bleu du tome 1 et une très belle tête d'Aube, le personnage féminin au centre du tome 2. Nous avons donc quitté le festival les derniers, à presque 19h30 mais quel bonheur !!!

     L'intérêt des festivals de BD, c'est aussi, peut-être même surtout, de découvrir de nouveaux auteurs, d'entrer avec eux, grâce à eux, dans de nouveaux univers. Par exemple, à Blois, nous avions rencontré un duo de frères très talentueux et sympathiques, Christophe et Rodolphe Hoyas. Le premier tome évoque un Dragon-planète qui a besoin de ceux qui le peuplent pour être sauvé. La dédicace de Rodolphe représente un visage féminin. Le deuxième tome relate une descente aux enfers merveilleuses et la dédicace montre une tête de dragon aux yeux rouges. Mais outre ces dessins, nous avons eu le plaisir de discuter avec ces deux frères : ils nous ont parlé, par exemple, de leur travail sur la refonte du premier tome. En effet, ils ont tenu compte des critiques qu'ils ont pu entendre et qui leur demandaient de dessiner davantage les événements, de montrer plus de choses... Et donc, ils ont abandonné quelque temps le travail sur le troisième tome, pour reprendre le premier dans lequel ils vont ajouter une vingtaine de pages. Leur travail n'est pas distribué, il est référencé dans peu de librairies et ils font tout, tous les deux. Ce sont les festivals qui leur permettent de se faire connaître des lecteurs. Si les couvertures et ma petite contribution vous donnent envie de mieux connaître leur univers, visitez leur site : http://dragon.planete.free.fr/

ou mieux encore leur compte facebook :

https://www.facebook.com/dragonplanete.lesfrereshoyas?fref=ts

dragon planète   l'arche des limbes

27 février 2012

MERCI A L'ACADEMIE DES OSCARS !!!

    Et voilà, c'est fait, The Artist a été récompensé !!! Outre que je suis heureuse de voir que l'Académie des Oscars est d'accord avec ma propre lecture du film, j'ai aussi été émue par les images de l'équipe, heureuse, tout simplement. Le travail bien fait a été récompensé. La lettre d'amour du cinéma français au cinéma hollywoodien a été reçue et comprise. C'est beau, tout simplement. Et quand on voit la suite des images des informations du jour, c'est une belle goutte de bonheur dans un monde bien triste...

20 février 2012

LITTERATURE, HISTOIRE ET PEINTURE

             

      Titien est l'un des plus grands peintres vénitiens et j'ai lu plusieurs romans qui le placent au centre de leurs intrigues. Etrangement, deux de ces romans en faisait un assassin... Mais, ce n'est pas le cas de ce roman de Metin Arditi publié chez Acte Sud qui s'intitule Le Turquetto. Titien est le point de départ de l'écriture du roman : l'auteur part d'un tableau attribué à Titien, L'Homme au gant (aujourd'hui au Louvre).

 

 L'homme au gant

   Mais si Titien et un de ses élèves les plus doués, le Turquetto, sont au centre du récit, sa richesse tient à l'ambiance vénitienne que l'auteur dessine avec justesse. Nous sommes au XVIe siècle, d'abord dans une Constantinople de plus en plus musulmane où le héros essaie d'échapper à son destin. C'est la mort de son père qui va lui en donner l'occasion et il part alors pour Venise et c'est là que le romancier nous conduit dans cette ville magnifique, trop riche déjà... Les luttes de pouvoir, l'attachement d'un nonce dépassé par les événements, les promenades dans la ville et les descriptions des toiles..., tout est écrit avec verve et précision. 

   C'est un roman qui plonge son lecteur dans un univers très pictural. C'est aussi un roman historique précis mais l'Histoire n'alourdit jamais l'histoire. Un plaisir de lecture.

19 février 2012

POUR QUI L'OSCAR DU MEILLEUR ACTEUR ?

    En l'espace d'une semaine, je suis allée voir deux films, les deux films dont les acteurs principaux sont favoris pour l'oscar du meilleur acteur dans quelques jours. Et franchement, je crois qu'ils ne jouent pas du tout sur le même plan.

    Dans The descendants, George Clooney campe un mari accablé par le futur décès de sa femme, qui apprend qu'elle le trompait, qu'elle était vraiment "folle" de cet homme... C'est souvent émouvant sans plonger dans le pathos. La qualité de film tient surtout au fait que les effets ne sont pas soulignés avec force comme c'est trop souvent le cas dans les films américains. Ainsi, une scène très forte dans laquelle la famille et les médecins entourent la plus jeune des enfants à qui l'on apprend la mort imminente de sa mère. Tout cela sans qu'on n'entende rien. Et c'est bien plus émouvant que des paroles des adultes confrontées aux cris de l'enfant...

     C'est peut-être cette scène qui a fait dire à Clooney dernièrement qu'il regrettait de n'avoir pas fait un film muet. Non ? Vous êtes sûr ? Ah ! évidemment, il disait cela parce que Jean Dujardin avait de nouveau décroché un trophée pour The Artist ! Et, outre que le film est magnifique, plein d'humour et d'émotions, rempli de clins d'oeil au cinéma américain et très bien construit, la performance d'acteur de Jean Dujardin est vraiment exceptionnelle ! Il fait croire à son personnage à chaque seconde du film. De l'acteur cabotin au comédien dépassé par la nouveauté, du mari désabusé qui offre des bijoux à sa femme pour se faire pardonner à l'homme orgueilleux qui ne veut rien devoir à celle qui l'aime et qu'il aime, il est parfait... Cela dit, Bérénice Bejo, si j'ose dire, lui donne la réplique de bien belle manière.

  Pour conclure, il s'agit de très beaux films, qu'il me semble difficile de comparer, joués par deux excellents acteurs ; mais si on parle de performance d'acteur, alors Jean Dujardin est bien meilleur que George Clooney...

  

18 février 2012

CIVILISATION

    En écoutant monsieur Guéant, repris en choeur par messieurs Baroin, Fillon et Sarkozy, je ne peux m'empêcher de me demander s'ils sont ignares ou de mauvaise foi. Et franchement, je ne sais pas laquelle des solutions est la pire ! Pour eux ; pour nous ; pour la France !!!

   En effet, ils font comme si les mots "civilisation", "valeurs", "société"... avaient le même sens. Or, il n'en est rien, évidemment. Mais, il semble que ça aille mieux en le disant, ou ici, en l'écrivant.

   Par hasard, ou plus exactement pour faire tout autre chose que chercher à démasquer les contrevérités de l'UMP, je feuilletais des numéros de l'excellente revue L'Histoire. Et je trouve, par hasard donc, dans le numéro de janvier 2007, un excellent dossier intitulé "Comment meurent les civilisations". Et dans ce dossier, une page au titre intéressant pour mon propos : "Qu'est-ce qu'une civilisation ?". Voilà comment se termine cet encadré de Laurent Theis :

"une définition large que peut fournir, par exemple, Lucien Febvre en 1930 : L'ensemble des caractères que présente, à l'observateur, la vie collective d'un groupement humain : vie matérielle, vie intellectuelle, vie morale, vie politique et vie sociale. 

     La double harmonique qui parcourt la notion de civilisation, demandons-la pour finir aux poètes : La civilisation n'est autre chose qu'une suite de transformations successives (Victor Hugo). Le globe n'est partout qu'un ossuaire de civilisations ensevelies. (Alphonse de Lamartine)."

     Il est donc tout à fait clair pour l'historien comme pour le sociologue que "les civilisations ressortissent non plus à l'évaluation, mais à la description, aucune ne pouvant plus se concevoir comme supérieure en quoi que ce soit à une autre, comme le soulignent avec force Claude Lévi-Strauss, Michel Leiris ou Jacques Soustelle."

     Non, messieurs, il n'est plus possible de dire aujourd'hui que "toutes les civilisations ne se valent pas" sauf à se conduire comme les colonialistes des temps passés...

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